La « bronchite aiguë» chez le patient en bonne santé : est-ce que les béta-agonistes comme le Ventolin soulagent les symptômes ?
C’est bien connu en clinique et dans les études, les béta-agonistes aident les patients asthmatiques ou souffrant de MPOC (bronchite chronique / emphysème) lors des épisodes de décompensation aiguë. Cependant, les patients sans maladie pulmonaire chronique, en bonne santé, se voient souvent prescrire la « fameuse pompe bleue » pour traiter la bronchite, lorsqu’ils consultent à l’urgence mineure. Nous avons vu que les antibiotiques offrent bien peu de bénéfices pour ces patients. Quant est-il des béta-agonistes inhalés ? Diminuent-ils les symptômes chez ces patients souffrant de toux persistante ?
Un résumé de la littérature paru dans la revue Annals of Emergency Medicine de décembre a tenté de répondre à la question. Ce synopsis provenait des données d’une méta-analyse Cochrane publiée plus tôt en 2015. Les 7 études analysées avec un total de 552 patients et un indice de qualité jugé de faible à moyen n’a pas permis de trouver un bénéfice, que ce soit pour les enfants ou les adultes. Les scores pour la toux, la toux nocturne ou la durée totale de la toux étaient les mêmes avec ou sans béta-agonistes. Cependant, les patients sous Ventolin ont rapporté plus d’effets indésirables comme la nervosité, les tremblements et la tachycardie (number needed to harm (NNH) de 2). De plus, le coût de la pompe elle-même est non-négligeable, variant de 20 $ à 75 $, sans inclure l’aérochambre. Une analyse de sous-groupe a tout de même révélé un bénéfice possible chez le patient avec symptômes de bronchospasme et wheezing / sibilances à l’examen.
La morale de cette histoire : le patient en bonne santé usuelle qui se présente avec une bronchite aigue sans évidence de sibilances ou de bronchospasme ne tirera pas de bénéfice d’une prescription de béta-agonistes courte action, comme le Ventolin. Il faut donc éviter de les prescrire à ces patients, et les réserver pour nos patients avec wheezing / sibilances ou chez nos asthmatiques / MPOC connus, en décompensation aiguë.
Une question demeure : que fait-on avec nos patients en bronchite aiguë qui sont « à bout de tousser », sachant que ni le Ventolin, ni les antibiotiques, ni les antitussifs, les expectorants et la codéine ne semblent fonctionner dans les études? C’est une des limites de la médecine… on a beau guérir des cancers, l’hépatite C et faire des transplantations variées, il ne semble pas avoir de bons traitements pour des conditions aussi communes que la bronchite et la gastro… difficile à accepter toutefois, quand cela fait des nuits qu’on peine à dormir!
Une solution peut-être : éduquer les patients. Savoir que le pronostic est bon, que le temps arrange les choses. Oui, ça peut facilement durer trois semaines, mais il n’y aura pas de séquelles. Juste de le savoir peut éviter un traitement futile et les effets indésirables qui viennent avec. Si le patient désire tenter quelque chose, les médicaments avec possibles bénéfices et à plus faible risque d’événements indésirables seraient le miel, l’irrigation d’eau salée intra-nasale et les corticostéroïdes intra-nasale.
En attendant, mieux vaut prévenir que guérir : on essaie de tousser dans notre pli de coude et on utilise fréquemment les gels à base d’alcool pour se laver les mains.
Santé pour 2016 !
Frédéric Picotte, MD
Daniel C. Kolinsky et al. Does b-2 Agonists for Acute Bronchitis Provide Any Benefit?
Annals of Emergency Medicine. 18 décembre 2015.http://www.annemergmed.com/a…/S0196-0644(15)01563-2/abstract
Becker LA et al. Beta-2-agonists for acute cough or a clinical diagnosis of acute bronchitis. Cochrane Database Syst Rev. 2015;(9): CD001726.http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26333656